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Les élus de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA) ont approuvé, lundi 21 octobre, à l’unanimité, le principe d’une taxe poids lourds destinée à réduire le trafic de transit et la pollution, malgré l’hostilité des acteurs économiques régionaux.
La CEA, née en 2021 de la fusion des conseils départementaux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, et qui a récupéré la gestion des routes et des autoroutes non concédées sur son territoire, souhaite imposer à partir de 2027 une taxe, baptisée R-Pass, de 0,15 euro/kilomètre pour les camions de plus de 3,5 tonnes circulant sur l’axe nord-sud (A35 et A36) et sur deux autres routes reliant cet axe à l’Allemagne.
La collectivité veut ainsi améliorer « la fluidité et la sécurité » de la circulation, réduire « la pollution atmosphérique et sonore », limiter la dégradation des routes et « rééquilibrer le trafic de transit entre l’Allemagne et la France ».
De l’autre côté du Rhin, les autorités allemandes ont mis en place dès 2005 une taxe, portée à 0,34 euro/kilomètre en janvier 2024. Cette hausse de la taxe allemande a provoqué une augmentation de trafic « de près de 20 % les six premiers mois », et de « 30 % » en août et en septembre sur l’axe autoroutier nord-sud d’Alsace, a fait valoir le président de la CEA, Frédéric Bierry, lors d’une séance plénière à Colmar (Haut-Rhin). « Notre territoire devient un aspirateur à camions, un réceptacle de tout le transit international », a poursuivi l’élu divers droite.
Affirmant qu’il y avait « une demande forte » pour « mieux réguler ce trafic », M. Bierry a assuré que le R-Pass se traduira par « moins de bruit, un air meilleur, un environnement immédiat aussi moins pollué pour les riverains de ces routes ». « C’est aussi des routes moins dégradées, moins de travaux d’entretien voire de réfection, et aussi des économies à la clé, ce qui n’est pas neutre [par] les temps qui courent », a-t-il souligné.
Pour bon nombre d’acteurs économiques alsaciens, la taxe pourrait en revanche porter un coup fatal à certaines entreprises. De 100 à 150 personnes ont manifesté lundi matin devant la CEA à Colmar, tandis qu’une centaine de contestataires, dont de nombreux agriculteurs, ont déversé des pneus devant les locaux de la CEA à Strasbourg.
« Nous ne comprenons pas pourquoi la CEA fait peser un nouveau risque sur nos entreprises et l’emploi avec cette taxe », se sont aussi inquiétés, dans un communiqué commun, les trois présidents des chambres de commerce, d’agriculture et des métiers d’Alsace, Jean-Luc Heimburger, Denis Nass et Jean-Luc Hoffmann.
Citant l’étude d’impact du cabinet Deloitte commandée par la CEA, ils avancent que cette taxe aboutirait à « prélever 64 millions d’euros par an sur l’économie » et pourrait entraîner la destruction de 1 500 emplois en Alsace dans le secteur des transports, tout en renchérissant les prix pour les consommateurs.
Le 7 octobre, une opération escargot avait été organisée à l’initiative de la Fédération nationale de transports routiers.
Certains acteurs, dont la Fédération des travaux publics Alsace, ont cependant exprimé leur soutien au projet, soulignant que les recettes seraient réaffectées à l’économie locale, comme l’a promis Frédéric Bierry. La taxe doit notamment permettre de financer le passage à deux fois trois voies de la route reliant Colmar à Sélestat (Bas-Rhin), un chantier de 150 à 200 millions d’euros.
Frédéric Bierry a assuré, lundi, que la concertation se poursuivrait pendant encore au moins un an pour déterminer les modalités de mise en œuvre et étudier « des compensations possibles pour l’ensemble des entreprises parce que, bien évidemment, notre enjeu, c’est [de] réduire le trafic de transit, mais ce n’est pas de pénaliser le monde économique ».
Le Monde avec AFP
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